Québec Urbain

L’Urbanisme de la ville de Québec en version carnet…


Plaidoyer pour un habitat humain

Par Envoyer un courriel à l’auteur le 5 octobre 2012 7 commentaires

Gilles Drouin
Magazine Contact (Université Laval)

L’architecte Pierre Thibault présente sa conception d’une maison où il fait bon vivre.

L’an dernier seulement, plus de 40 000 rési­dences unifamiliales ont été mises en chantier au Québec. Mais construisons-nous les bonnes maisons? La réponse d’un professeur à l’École d’architecture: non! Pierre Thibault croit toutefois que le vent tourne et que le Québec mettra fin à 50 ans de dérive architecturale à condition de s’ouvrir aux autres et de laisser place à l’imagination. Une philosophie qu’il expose dans son livre Les maisons-nature de Pierre Thibault, paru en 2010 aux Éditions La Presse. Contact a recueilli les propos de l’architecte dans son atelier du quartier Saint-Roch à Québec

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Voir aussi : Architecture urbaine.


7 commentaires

  1. Manu

    6 octobre 2012 à 00 h 04

    C’est un problème assez généralisé chez les architectes: s’imaginer qu’ils sont aptes à juger si on construit ou non les bonnes maisons. Ils sont pour la plupart conditionnés à croire qu’il faut connaître l’architecture pour porter un jugement alors que c’est probablement tout le contraire. Leur bagage de connaissances et leurs ambition biaisent complètement leur jugement.

    Je parle ici de « où il fait bon vivre ».

    Il n’y pas meilleur juge sur cette question que les personnes qui habitent un maison. Nul besoin de connaître l’architecture pour dire si on se sent bien ou non dans sa maison. Même que c’est probablement plus facile de se sentier bien quand on ne connaît rien que quand on en connaît plus et qu’on n’est jamais satisfait.

    Évidemment, le « confort technique » que vante M. Thibault n’est pas a négliger. Loin de là. Tout le monde apprécie souper l’hiver sans se geler les pieds à cause d’une vieille porte patio, sentir le chaud soleil à travers de grande fenêtres quand il fait -10 dehors, avoir de l’air propre dans la maison, et que celle-ci soit construite de matériaux non « poussiéreux », non toxiques, etc. Alors là-dessus, je lui donne au moins à moitié raison, on pourrait faire mieux.

    Cela étant dit, tout ça ne vaudra jamais le sentiment de bien être qu’on a (ou qu’on a plus) quand on passe 20 ans dans la même maison, ou quand on en visite pour un achat: si ça « clique pas » en 5 minutes, et que tout ce qu’on trouve à dire c’est « ouais… c’est super bien fait ici et c’est euh… spécial, ouin, c’est spécial », eh bien c’est raté.

    On pourrait aussi étendre ce bien-être à celui de déambuler dans la rue devant ces maisons, ou dans un quartier en général. Là on glisse tranquillement de l’architecture à l’urbanisme. Mais le principe est le même, si ça laisse un bonne impression, c’est réussi, sinon c’est raté.

    La nature humaine était ce qu’elle est, la plupart se sentent bien dans une maison où ils trouvent à la fois confort et réconfort, ce dernier étant bien souvent associé à celui qu’on a connu plus jeune. Il ne faut donc pas se surprendre que ça ne change pas beaucoup de génération en génération. Mais c’est ainsi… c’est là-dedans que les gens trouvent qu’il « fait bon vivre », peu importe ce qu’en disent les architectes.

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    • nietnietniet

      6 octobre 2012 à 10 h 32

      Bien dit manu !

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    • Carl Utilisateur de Québec Urbain

      7 octobre 2012 à 06 h 57

      Les architectes « imaginent » qu’ils sont aptes à juger la qualité de l’environnement bâti pour les mêmes raisons que les ingénieurs civils s’imaginent aptes à juger de la qualité des infrastructures urbaines, les médecins s’imaginent aptes à évaluer la qualité de la santé des gens, ou les entraîneurs sportifs s’imaginent aptes à évaluer la qualité de leurs joueurs. Ils ont la formation nécessaire pour réfléchir à, et analyser ce qui fonctionne bien ou moins bien lorsque vient le temps de produire du bâti. Malheureusement on a souvent tendance à penser au Québec que l’éducation ne sert pas à grand chose, et que comme toutes les opinions se valent, que l’ignorance et la connaissance sont équivalentes. Ce n’est pas le cas.

      Deux exemples, tous deux tirés de mon expérience à titre d’inspecteur en bâtiment et responsable de l’émission des permis en Beauce il y a de cela (dieu merci) plus de 15 ans:

      – On veut faire construire une résidence dans la vallée de la rivière Chaudière, sur une rue qui (comme bien des rues dans les villages de la vallée) est perpendiculaire à la rivière. Les plans ont (bien entendu) étés achetés de Dessins Drummond, après avoir vu un rendu dans une revue achetée dans un dépanneur. Les grandes fenêtres sont situées sur les façades avant et arrière de la maison, les deux côtés n’ayant que de petites ouvertures pour les salles de bains et les puits d’escalier. Comme la vue vers la vallée est magnifique (la résidence étant construite face à un des plus beau paysages ruraux de la Beauce, Saint-Joseph-des-Érables), je suggère lors de la visite sur le site de simplement tourner le plan à 90˚ afin que les grandes fenêtres ouvrent vers la vue, et non vers le voisin d’en face. « Ben non, » qu’on me répond « il faut que l’entrée soit face à la rue! » – pourquoi donc? On ne parle pas ici d’animer la rue Cartier ou la rue Maguire, c’est une rue pas de trottoirs situé dans un développement rural. Pourquoi ne pas profiter du paysage?? En plus, pivoter le plan de cette façon aurait rendu l’intérieur beaucoup plus lumineux car une bonne partie des fenêtres auraient été orientées vers le sud-ouest.

      – Une dame est propriétaire d’un terrain en bordure du seul lac de villégiature de la MRC. Sur le terrain se trouve une vieille bicoque qu’elle souhaite démolir afin de reconstruire un chalet de meilleure qualité susceptible de devenir une résidence permanente plus tard. Cependant les contraintes réglementaires de même que les dimensions de son terrain font que l’enveloppe à l’intérieur de laquelle tout nouveau bâtiment sera construit sera très allongée mais très peu profonde: quelque chose comme 14 x 3,5m. Lors de la visite sur le site, je lui explique le tout. La pauvre dame était démontée « Mais ma cuisine ?!? » « Quelle cuisine ?» « J’ai vu ma cuisine dans une revue, c’est cette cuisine là que je veux dans mon chalet !» Un plan acheté dans une revue de dépanneur ne pourra jamais répondre à ses besoins; mais si elle avait considérée faire appel aux services d’un professionnel, il / elle aurait pris en considération l’ensemble des facteurs contraignants, *de même que* les besoins et désirs de son client *ainsi que du budget disponible* et serait arrivé à une solution, car c’est son rôle et il / elle a la formation nécessaire à l’éxécution de son mandat.

      Ce n’est pas l’architecte qui dira si oui ou non les gens finiront par se sentir bien dans une maison. Mais on finit toujours pas s’habituer à tout, même à des souliers inconfortables – l’architecte cherchera à minimiser l’inconfort et à maximiser le confort.

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      • Yvan Dutil

        7 octobre 2012 à 09 h 43

        Bon point. Déjà si on alignait les maisons dans le sens du monde.

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      • Manu

        8 octobre 2012 à 00 h 00

        Oui Carl, c’est pourquoi je démêlais l’aspect technique de l’aspect plus émotionnel, plus humain justement. Donc rien à voir avec l’ingénieur civil…

        Évidemment, rien n’empêche d’ouvrir les yeux des gens sur un paquet de chose. Reste que ce sont eux, qu’ils soient « architecturalement cultivés » ou non, qui peuvent dire s’ils se sentent bien ou non. Sinon, professionnellement, un psychologue serait probablement mieux placé qu’un architecte…

        Au pif (si quelqu’un s’y connait dans le domaine qu’il s’exprime), je dirais que les gens aiment bien la nouveauté et les idées visionnaires lorsqu’il existe un détachement émotif (par exemple, les nouvelles technologies qu’on intègre à la vie quotidienne, des plans de développement d’une ville, etc.). Toutefois, lorsque ça vient chercher les gens plus profondément (un chez soi), alors là nombreux sont plus réticent au changement. On cherche se qu’on connaît déjà, le réconfort.

        Bref, je ne dénigre pas le rôle des architectes, mais je dis simplement qu’ils ne sont pas (nécessairement) psy ou gourous…

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  2. François Magellan

    6 octobre 2012 à 11 h 17

    l’architecte questionne, avance, propose, en quelque sorte ce qu’on appelle en sciences de la recherche fondamentale, pour accoucher de concrets.
    je considère l’architecture comme de la culture, comme on a besoin de voyager pour apprendre et voir ce qui se fait ailleurs. On apprécie ce que l’on a, on se nourrit de l’autre,et en définitive, on peut se dire ce que l’on avait c’était bien, mais après avoir vu et lu ce qui se peut se faire ailleurs, on pourra conclure : c’est encore mieux.

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    • Manu

      8 octobre 2012 à 00 h 26

      Oui, et malheureusement, comme dans bien des domaines où on peut se cultiver, cela n’intéresse sérieusement qu’une petite partie des gens. Les autres sont parfaitement heureux avec « la même chose pas compliquée que tout le monde » par exemple, et il n’y pas de raison de croire qu’ils seraient plus heureux en étant plus cultivés.

      Pour revenir à M. Thibault, notons qu’il reste très terre à terre, et j’aurais peut-être dû parler de tous ses bons points (pratiquement tout l’article en lien finalement) plutôt que simplement de sa petite dérive qui m’agaçait, à propos de ce que les gens veulent, où il fait bon vivre… Ça demeure évidemment loin du cas pathétique de défoulement envers les incultes, comme un peintre qui prétend faire du grand art avec trois bandes de couleur et insulte tous ceux qui le critique en disant qu’ils n’y connaissent rien.

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