David Rémillard
Radio-Canada
Seule ville de la province à compter sur une instance comme la Commission d’urbanisme et de conservation, Québec n’échappe pourtant pas aux démolitions de bâtiments à valeur patrimoniale. Si la situation semble sous contrôle dans les arrondissements historiques, des voix réclament de nouveaux pouvoirs pour la Ville et une révision de la Commission.
Dans son rapport rendu public la semaine dernière, la vérificatrice générale du Québec a vilipendé le ministère de la Culture et des Communications, taxant l’État de n’avoir aucune vision pour conserver le patrimoine bâti. Le constat, particulièrement sévère, était global et généralisé.
La Commission d’urbanisme et de conservation de Québec (CUCQ) n’a cependant pas fait l’objet d’une analyse approfondie. L’instance décisionnelle est unique au Québec de par ses pouvoirs et son rôle de tribunal administratif.
L’église Saint-Cœur-de-Marie, la maison des Pasquier, la Villa Livernois : des bâtiments à valeur patrimoniale ont disparu ces dernières années, négligés, détruits ou abandonnés. D’autres donnent l’impression d’être sur le respirateur artificiel, comme la Maison Pollack, sur la Grande Allée.
Pourtant, ils figurent tous à l’inventaire du patrimoine bâti de la Ville de Québec.
Dans ce contexte, Jean Rousseau, conseiller municipal du district de Cap-aux-Diamants, où la Commission est fort active, dresse un bilan mitigé de ses actions, surtout à l’extérieur du Vieux-Québec.
Il admet d’emblée qu’elle accompagne bien les citoyens propriétaires dans leurs demandes de travaux, a fortiori dans les arrondissements historiques. Elle est très exigeante, ajoute-t-il, à propos de son rôle de maintenir la cohérence architecturale des différents territoires sous sa responsabilité.
Mais l’élu de Démocratie Québec identifie plusieurs lacunes quand vient le temps de protéger des bâtiments à valeur patrimoniale en manque d’amour, ou qui ne sont plus dans les plans de développement d’un propriétaire. Cette stratégie de la démolition par abandon a d’ailleurs été relevée par la vérificatrice générale.
Il prend pour exemple l’église Saint-Cœur-de-Marie, détruite après des années d’affrontement avec un promoteur. Ou encore la Maison Pollack, toujours debout, mais abîmée au point d’être la prochaine qu’on va perdre.
Quand on regarde les bâtiments dont elle a la responsabilité, quand on est rendu là, on voit que ses pouvoirs, ça ne veut rien dire, ça n’a pas de portée, se désole Jean Rousseau. Si vous êtes dans un environnement où le patrimoine ce n’est pas important, la Commission ne signifie pas grand-chose.
Et quand les leviers manquent et qu’il faudrait se tourner vers l’autorité supérieure qu’est le ministère de la Culture, M. Rousseau n’y va pas par quatre chemins : À Québec, on a une capacité de bien faire. […] Par contre, le ministère de la Culture n’est pas du tout aidant, il est aux abonnés absents. Il nous nuit, littéralement.
Et ce, même si la Ville jouit d’une grande expertise comparativement à la majorité des municipalités de la province.
Le conseiller relève également une certaine opacité de la Commission d’urbanisme. Il se questionne aussi sur un potentiel biais politique à travers ses orientations. Il soutient que dans certaines situations, la Commission est à la traîne du comité exécutif.
En vertu du règlement qui la gouverne, l’instance est présidée par le maire de la ville. Régis Labeaume a délégué cette tâche à la conseillère Suzanne Verreault. Deux autres élus d’Équipe Labeaume y siègent actuellement, alors que les six membres restants sont des architectes, des conseillers en patrimoine ou encore des urbanistes.
Impossible toutefois d’évaluer son travail en profondeur. Les délibérations se font à huis clos, elle ne publie pas ses avis ni de rapport annuel. Elle a toutefois l’obligation d’expliquer ses décisions à ceux qui lui déposent des projets.
Le Bureau de l’ombudsman de la Ville de Québec ne peut l’évaluer non plus. Notre bureau ne peut enquêter sur les décisions du conseil de ville, du comité exécutif, d’un conseil d’arrondissement, d’un comité ou d’une commission de la Ville, y rappelle-t-on.
14 juin 2020 à 11 h 48
Que dire des grandes propriétés conventuelles qui sont laissées aux mains des promoteurs qui évoquent par la suite la désuétude pour démolir un patrimoine important à Québec.
La démolition du couvent des Augustines dernièrement est un scandale. Ce sera remplacé par un bâtiment générique, néo machin qui rappelera un tant soit peu quelque chose pour que la commission dise oui…
Aucune scrupule de la part des promoteurs, et architecture médiocre, densification sauvage… bref on détruit une à une les caractéristiques de la ville
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