Baptiste Ricard-Châtelain
Le Soleil
Le propriétaire du Sanuel-Holland espère que cette fois sera la bonne, qu’il pourra finalement agrandir le complexe immobilier de six tours. Dans la dernière mouture du projet présentée à l’administration municipale, 168 logements apparaîtront progressivement à partir du printemps le long de l’avenue Ernest-Gagnon, sur les ruines d’un ancien poste de la GRC et un stationnement.
Depuis janvier que nous tentions d’échanger avec un dirigeant de Canadian Apartment Properties Real Estate Investment Trust (CAPREIT), un fonds de placement de Toronto qui a mis la main sur le Samuel-Holland en 2012. Puis, lundi matin, tandis que nous participions, en visioconférence, à la rencontre hebdomadaire des journalistes de la rédaction du Soleil, notre cellulaire a vibré. L’écran annonçait un appel du président et chef de la direction du géant de l’immobilier, Mark Kenney.
Après trois articles au sujet de l’état de délabrement avancé de sa propriété du 870, avenue Ernest-Gagnon — l’ancien quartier général local de la Gendarmerie royale du Canada déserté en 1996 — il tenait à nous dire que, lui, il est prêt depuis des années à éliminer cette verrue, à bâtir en neuf. De lourdes tracasseries administratives freineraient cependant son ambition d’ajouter des dizaines de portes au complexe comptant déjà presque 800 logis et plus d’une quarantaine de locaux commerciaux.
«Le projet au 870, Ernest-Gagnon implique la transformation du bâtiment commercial [abandonné] et du stationnement [de surface voisin] en un immeuble de 8 étages avec environ 168 unités locatives», nous explique Mark Kenney. Il y aura également deux niveaux souterrains pour les voitures.
CAPREIT a donc amaigri sa vision pour ces lots. Dans la version «2017», soumise à la Ville, il était proposé d’ériger une structure en trois paliers, de 4, 8 et 11 étages. La hauteur de cette future construction aurait oscillé entre 12 mètres et 35 mètres.
La proposition «2021» a le gros avantage de permettre à CAPREIT de se conformer au Programme particulier d’urbanisme du pôle urbain Belvédère produit par la Ville. Celui-ci exige une hauteur maximale de 16 m à 24 m, soit 5 à 8 étages et que la structure soit plus basse sur le bord de la rue.
Cela a également l’avantage d’éviter d’avoir à demander un changement au zonage, avec les consultations publiques que ceci implique.
2 et 8 étages
Sur les nouvelles perspectives architecturales fournies, nous voyons un bâtiment de deux étages en bordure de la rue. Des «maisons de ville».
À l’arrière, une construction plus volumineuse où sera regroupé l’essentiel des logements. Tous offerts en location, pas pour vendre, annonce le patron de l’entreprise dont les possessions vaudraient autour de 11 milliards $.
Mark Kenney ajoute : «CAPREIT peaufine les détails du design du projet avec son équipe de consultants et escompte déposer sa demande de permis de construction au début 2022.»
Voilà bien des années que des développeurs lorgnent ces terrains de grande valeur, dans le populaire quartier Saint-Sacrement. CAPREIT rêve d’y ériger des tours depuis l’achat du Samuel-Holland en 2012. Des propriétaires précédents avaient aussi beaucoup d’ambition, mais s’étaient cassé le nez contre l’opposition populaire.
CAPREIT travaille son plus récent projet depuis la fin 2019, rappelle Mark Kenney. Le fonds torontois avait alors soumis un dossier à la Commission d’urbanisme et de conservation de Québec (CUCQ). La cause avait été entendue en février 2020. Sans succès. L’entreprise a retravaillé ses plans et est revenue à la charge en janvier 2021. Les commentaires auraient été beaucoup plus favorables, ce qui donne espoir que le permis de construction sera délivré à la suite de «modifications mineures».
«Pour l’heure, un permis de démolition a été octroyé pour le bâtiment existant et le travail doit début en août.»
Mark Kenney évalue que l’investissement total sera «quelque part entre 40 millions $ et 50 millions $».
Le président et chef de la direction de CAPREIT, Mark Kenney, pense que les gouvernements du Québec et du Canada devraient rapatrier les pouvoirs en matière d’habitation, de zonage. Les Villes mettraient trop de bâtons dans les roues des promoteurs.
Son entreprise est prospère. Elle a des liquidités à investir, des moyens pour construire des milliers et des milliers de logements, dit-il.
Mais les municipalités — leurs règles de zonage — freineraient les chantiers. «Le problème, c’est que nous avons besoin de plus de logements. […] La volonté de construire est là. Mais ça prend des années et des années parce que cela relève du municipal.»
Le Canada, le Québec, sont des terres d’accueil pour les immigrants, explique-t-il notamment. Les nouveaux arrivants ont cependant besoin d’un toit rapidement. Pour favoriser l’arrivée de nouveaux résidents, les gouvernements supérieurs devraient donc établir un «plan» national pour le logement.
Plus gros
Les promoteurs immobiliers font face à des coûts de matériaux en hausse, ajoute-t-il. Tout comme à une crue impressionnante du prix des terrains. Ils doivent donc pouvoir construire plus gros, plus haut, pour rentabiliser leurs investissements, plaide Mark Kenney.
Sauf que les démarches pour faire changer le zonage municipal en conséquence sont longues et difficiles, selon lui. D’autant que les villes font souvent face à de la contestation populaire.
Voilà pourquoi, pour l’investisseur, les gouvernements du haut devraient décider.
25 août 2021 à 11 h 02
Ouf! Sans vouloir prêter de mauvaises intentions, ce ne semble pas être le genre de promoteur qui prend compte des communautés et des citoyens. Avec un tel commentaires: « Sauf que les démarches pour faire changer le zonage municipal en conséquence sont longues et difficiles, selon lui. D’autant que les villes font souvent face à de la contestation populaire. Voilà pourquoi, pour l’investisseur, les gouvernements du haut devraient décider. », on peut s’imaginer le lobbying agressif de ce genre de promoteur. Si j’étais un habitant du secteur, je commencerais à m’inquiéter. Veux-t-on une gigantesque tour à cet endroit. Déjà que le Samuel-Holland fait tache dans le secteur. Nous verrons bien.
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