Québec Urbain

L’Urbanisme de la ville de Québec en version carnet…


Projet de tramway: le maire Labeaume prend la parole

Par Envoyer un courriel à l’auteur le 26 août 2020 19 commentaires

François Bourque
Le Soleil

Après treize années à l’hôtel de ville marquées par l’effervescence et une confiance collective ragaillardie, le maire Régis Labeaume se rend aujourd’hui à l’évidence.
«On est en train de retomber dans nos vieux démons d’avant 2008. C’est exactement ce qu’on est en train de faire».

«La fierté de 2008, elle est rendue où?» demande-t-il. «On avait compris qu’on était une ville ambitieuse, attrayante, l’avenir était à nous autres. Qu’est-ce qui se passe?»

Il ne saurait dire pourquoi. «Ça doit être dans notre ADN», suggère-t-il, un peu fataliste.

Nous en étions alors à faire le point sur le projet de tramway. Malgré sa nostalgie des années folles, les critiques et la tiédeur du gouvernement Legault, le maire dit ne pas sentir son gros projet menacé. Pas même s’il devait y avoir une récession.

«François Legault va le faire [le tramway]. J’ai confiance au premier ministre».

N’empêche qu’on sent le maire agacé.

«On était partis pour la gloire et on accepterait que dans notre ville qu’on embellit de jour en jour, on voudrait pas avoir un investissement de 3 milliards pour se bâtir un tramway?»

Cela lui paraît invraisemblable. «Comment tu veux qu’il [gouvernement Legault] fasse des projets de transport structurant à Montréal et qu’il passe par-dessus Québec? Ça n’arrivera pas», tonne-t-il, comme s’il avait besoin de s’en convaincre.

« François Legault va le faire [le tramway]. J’ai confiance au premier ministre »
— Le maire Régis Labeaume

(…)

Le maire Labeaume n’en veut pas au gouvernement Legault de le laisser seul défendre le tramway. Ou si c’est le cas, il n’en laisse rien paraître.

Son analyse du paysage politique est la suivante:

Les députés de la CAQ à Québec ont été élus sur la promesse d’un troisième lien et «veulent livrer la marchandise».

«Moi, je les énerve parce que je suis pressé». Cela place le premier ministre dans une situation délicate.

«Quand il va parler du tramway, il faut qu’il parle du troisième lien». Le problème est que le projet de troisième lien n’est pas prêt. «Le premier ministre, il faut qu’il me ralentisse, c’est ça sa job, pour servir sa clientèle troisième lien».

«Politiquement, je le comprends. Ça ne veut pas dire que ça fait mon affaire».

Viendra un moment ou il faudra que «tout le monde dise la même affaire en même temps», pense M. Labeaume. «Là, il y a distorsion actuellement. Ce qu’il faut, c’est la transparence des intentions».

«Beaucoup de gens ne sont pas sûrs que le projet va se faire. C’est ça qui crée une ambiguïté. Le monde a une patte en l’air». Il y a «encore un maudit paquet de gens à Québec qui pensent qu’ils peuvent avoir un métro».

Cette transparence des intentions, elle viendra vraisemblablement en novembre, après le rapport du BAPE. En attendant, la Ville de Québec a tous les moyens légaux et l’argent nécessaire pour continuer à avancer, assure-t-il.

Il a parlé pour la dernière fois à François Legault au début de l’été, le 26 juin. Il était même au cabinet du PM le jour où celui-ci a mis émis des doutes sur la nouvelle mouture du tramway et insisté sur la nécessité de desservir les banlieues.

L’hypothèse du maire est que M. Legault ignorait alors le projet de desserte des banlieues du nord que la ville venait de rendre public quelques jours plus tôt. L’annonce s’était probablement perdue dans les bruits de la COVID, suggère-t-il.

Dans les faits, on n’a «jamais eu une toile aussi développée de transport collectif régional», plaide le maire. «Ce qu’on fait dans la couronne périphérique est beaucoup plus importante que le trambus» qui vient d’être abandonné.

Hormis la demande de rendre public le plan d’affaires du projet de tramway, on n’a pas entendu le maire se plaindre du BAPE, même si ce fut un passage difficile.

«Un BAPE, c’est pas fait pour les bonnes nouvelles, c’est fait pour les gens qui s’inquiètent», philosophe-t-il.

À ceux qui s’inquiètent de la disparition de nombreux arbres le long du trajet, notamment sur René-Lévesque, il avait ceci à dire:

Pas question de retrancher une voie de circulation pour sauver des arbres, comme des citoyens et groupes l’ont proposé.

Mais la Ville embauchera les spécialistes les «meilleurs au monde» pour essayer d’en sauver un maximum.

«Money is no object. On a l’argent pour le faire. Quand ce sera pas possible, on va aller voir chacun des individus et lui demander ce qu’il veut devant chez lui. On va faire tout ce qu’ils veulent».

Le maire convient que son administration a probablement été trop silencieuse à expliquer le projet de tramway, ce qui a pu contribuer à une baisse d’acceptabilité sociale.

«À cause de la COVID, on n’a pas fait le programme de promotion prévu». dit-il.

Mais la COVID n’explique pas tout. Il y a aussi que Québec ne voulait pas exposer trop vite le projet dont elle ne connaissait pas tous les détails. Elle en paye aujourd’hui le prix. Comme elle en avait payé le prix lorsqu’elle avait gardé le silence pendant que le défunt projet de SRB était malmené sur place publique.

Bien que les contrats avec le consortium choisi ne seront pas signés à l’automne 2021, M. Labeaume ne croit pas que le tramway deviendra l’enjeu unique de la prochaine élection.

«Les élections référendaires, ça marche pendant une semaine, dix jours, puis après ça, c’est terminé».

«Le monde ne sortira pas en masse en novembre 2021 pour cracher sur 3 milliards $ dans l’état où sera l’économie probablement». Ajoute-t-il.

Ça reste à voir.

Le texte intégral

Labeaume s’en va-t-en-guerre (une fois de plus) Mario Girard (La Presse). Un extrait:

Le problème que rencontre le projet de tramway du maire Labeaume, c’est qu’il côtoie celui du troisième lien qui unira Lévis et Québec par un tunnel routier. Le mariage entre ces deux mégaprojets est difficile. Plusieurs voix se sont élevées récemment pour réclamer la fusion des deux bureaux de projet. « L’un des problèmes, c’est qu’il y a encore des gens qui pensent que l’on peut avoir un métro, reprend Labeaume. Le gouvernement garde les citoyens une patte en l’air avec ça. Le gouvernement a promis un troisième lien. Les élus de la CAQ de la région de Québec ont été élus là-dessus. Nous, on est prêts avec notre tramway, mais le gouvernement essaye de nous gérer pour gagner du temps avec le troisième lien. » Avec quoi exploiterait-on ce troisième lien ? Des autobus électriques ? Un train léger ? Je demande à Régis Labeaume quelle est sa vision de ce projet. « Mon cher monsieur, je vais vous renvoyer au ministère des Transports, moi, je gère ma bâtisse.»

Une entrevue à la radio de Radio-Canada

Voir aussi : Projet - Tramway, Transport, Transport en commun.


19 commentaires

  1. Jeff M

    26 août 2020 à 10 h 39

    Il y aura toujours un angle d’attaque possible envers n’importe quel projet majeur. Tous les arguments contre se confondent en excuses pour ne rien faire. On ne peut pas que s’opposer au projet. Il faut aussi arriver avec des alternatives crédibles, ce qui fait cruellement défaut à ce moment-ci. C’est très probablement ce qui va faire que le projet va se réaliser, sûrement avec des modifications, mais le mode tramway est au fond difficile à remplacer.
    Legault est pris entre l’arbre et l’écorce. Il ne veut pas faire le cheerleader, mais en même temps, envoyer des milliards ailleurs ça fait pas winner non plus.

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  2. Dédé

    26 août 2020 à 15 h 17

    «sûrement avec des modifications»

    Hum, je me demande bien ce qu’il reste à modifier.

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  3. Gérald Gobeil Utilisateur de Québec Urbain

    26 août 2020 à 15 h 50

    Invitation aux médias – Point de presse de la vice-première ministre, ministre de la Sécurité publique et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale

    QUÉBEC, le 26 août 2020 /CNW Telbec/ – La vice-première ministre, ministre de la Sécurité publique et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, Mme Geneviève Guilbault, invite les représentants des médias à un point de presse concernant l’enjeu du transport collectif dans la grande région de Québec.

    Date : Le mercredi 26 août 2020
    Heure : 16 h 15
    Lieu : Hall principal de l’hôtel du Parlement
    Assemblée nationale du Québec
    Québec (Québec)

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  4. Gérald Gobeil Utilisateur de Québec Urbain

    26 août 2020 à 16 h 44

    Geneviève Guilbault répond à Régis Labeaume: il faut «une vision régionale du transport» dont banlieues, rive sud et tunnel 3e lien. «Pour nous c’est une évidence que tout ça doit se concevoir en intégrant l’un à l’autre, en ayant à l’esprit l’un quand on fait avancer l’autre.» (Valérie Gaudreau, Le Soleil)

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    • Insider

      26 août 2020 à 17 h 32

      Mme Guilbault : « … mais notre avis est que le métro, c’est une technologie qui coûte cher, ce n’est pas la bonne option pour une ville de la taille… avec une population de la taille de celle de la ville de Québec. Et donc, non, nous ne sommes pas en train de travailler et nous ne travaillerons pas sur un projet de métro à Québec. Encore là, on voit mal le lien qui a été fait ce matin, là, parce qu’on ne travaille pas du tout sur ce scénario-là. »

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    • Dédé

      26 août 2020 à 17 h 55

      «Pour nous c’est une évidence que tout ça doit se concevoir en intégrant l’un à l’autre, en ayant à l’esprit l’un quand on fait avancer l’autre.»

      Bravo !!!

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  5. julien

    26 août 2020 à 17 h 49

    Le maire semble avoir obtenu une partie de ce qu’il voulait. L’affirmation de la CAQ qu’il n’y aurait pas de projet de métro à Québec.

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  6. Che

    26 août 2020 à 18 h 19

    J’ai toujours été très froid à l’idée de combiner les deux projets. Je me préoccupe surtout par l’échéancier qui va encore être repoussé dû à la complexité du projet combiné.

    Mais… peut-être que le fait de combiner le projet de TEC à celui du tunnel (automobile) est peut-être un moyen de faire passer le projet auprès de la population et de limiter l’opposition (autant au tramway qu’à l’autoroute).

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  7. Jean François Côté

    26 août 2020 à 19 h 56

    C’est toute une sortie du maire ! Ça fait du bien à entendre ! Une communication et une parfaite démonstration pour éclairer les gens et faire bouger le gouvernement . Chapeau au maire de Québec !

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  8. Insider

    27 août 2020 à 07 h 27

    Tout un travail de préparation de la part de Bernatchez. Dans son entrevue avec le maire, j’ai particulièrement apprécié ses questions concernant les arbres! On ne sentait pas du tout que ça avait été préparé rapidement sur « une napkin ».

    Une telle maîtrise des raisons qui font que l’on doive abattre autant d’arbres me laisse admiratif. D’autant plus que l’on sait que Bernatchez est toujours monté au combat lorsque l’on abattait des arbres pour faire place à de nombreuses places de stationnement.

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