Québec — Le modèle de la maison unifamiliale n’est pas un absolu pour tous les acheteurs, selon un nouveau sondage. Beaucoup de gens, les jeunes surtout, seraient prêts à considérer des jumelés, des maisons de ville et des habitations plus denses pour peu qu’on les leur propose.
«Si la maison unifamiliale a toujours la cote, on remarque une ouverture à différents types de maison permettant d’atteindre des densités nettes allant jusqu’à 40 logements par hectare», a fait valoir hier la professeure de l’Université Laval Carole Després à l’occasion d’un colloque de la Société d’habitation du Québec.
Le sondage a été mené auprès de 1138 internautes souhaitant déménager d’ici cinq ans. Les répondants, dont 499 étaient des étudiants, devaient fournir leurs préférences résidentielles. Ils pouvaient cocher plusieurs choix, allant des tours avec ascenseur aux maisons de banlieue avec terrain, en passant par le jumelé et la maison de ville.
Les résultats montrent aussi que les immeubles à trois étages — comme ceux qu’on retrouve en grand nombre dans Limoilou — sont très populaires. «Les immeubles collectifs de trois étages rejoignent les aspirations de quatre profils de résidants sur six», a signalé Mme Després, avant d’ajouter qu’on devrait «miser sur ce type d’immeubles».
Cette spécialiste de l’étude des banlieues souligne qu’actuellement les locataires sont «les grands oubliés» du marché. Même si le désir d’acquérir un condominium «demeure très présent», «une fraction importante désire habiter des immeubles locatifs».
Malgré les signes d’ouverture à la densification, Mme Després ajoute que l’étude portait sur les gens qui veulent déménager et qu’il ne faut pas oublier l’importance de ceux «qui veulent rester en place».
Le colloque auquel elle participait portait d’ailleurs sur les difficultés qu’éprouvent les pouvoirs publics à vendre la densification notamment aux citoyens voisins des projets. À plusieurs reprises, les conférenciers ont fait allusion à des projets controversés, comme l’îlot Irving à Québec et Griffintown à Montréal.
«Nous avons beaucoup d’efforts à faire en banlieue pour développer un autre type de quartier», a fait valoir le directeur de la Communauté métropolitaine de Montréal, Massimo Iezzoni. Selon lui, les villes gagneraient à diffuser leurs propres outils d’urbanisme, comme «Walk Score» et «Google Sketch», pour que la population « puisse visualiser les projets ».
Rare voix discordante, le représentant de l’Association des constructeurs d’habitations (APCHQ), François Bernier, a dit qu’il n’y avait pas matière à en parler «parce que du locatif et du condo, c’est tout ce qui se fait» et que «l’industrie contribue à la densification».
À son avis, les promoteurs y recourent d’autant plus qu’ils manquent de moyens. «La densité compense l’abordabilité [sic] réduite. Quand on n’est pas capable de se payer quelque chose, la solution de l’industrie, c’est d’en offrir plus sur le même terrain.»
M. Bernier estime par ailleurs «qu’en milieu dense, tout est plus cher» et que les gens payent alors plus cher en taxes et en services municipaux. Dès lors, le bénéfice de la densification serait «social» plutôt que privé.
Cette affirmation a par la suite fait bondir le président du lobby vert Vivre en ville, Alexandre Turgeon, selon qui il n’y a pas de lien entre les taxes et la densification. «Ce n’est pas la demande, le problème, c’est l’offre, a-t-il dit. Il n’y a pas assez d’options offertes au citoyen. La population ne peut pas aspirer à des choses qu’elle ne connaît pas.»