François Bourque
Le Soleil
CHRONIQUE / La Ville de Québec dit réfléchir encore aux suites légales à donner à la démolition sans permis de l’ancienne résidence «patrimoniale» du maire Labeaume, avenue du Cap-au-Diable, à Sainte-Foy.
La vente a été conclue au printemps 2019 par l’entremise d’un agent. La démolition a été constatée par la Ville en janvier dernier.
Dans les faits, il n’y a pas mille hypothèses. Le règlement prévoit que quiconque fait des travaux de démolition de logement sans permis commet une infraction et est passible d’une amende de 1000 $ à 10 000 $.
En cas de seconde offense, les amendes sont doublées, mais on comprend qu’il serait difficile de démolir deux fois la même maison.
L’autre geste juridique que pourrait poser la Ville serait de refuser de délivrer un nouveau permis de construction. Si le propriétaire contestait cette décision, cela mènerait à un procès. C’est vraisemblablement ce qui va se produire.
On peut trouver qu’une amende de 1000 $ à 10 000 $, c’est bien peu payé pour la destruction d’une maison, de surcroît patrimoniale. Le règlement actuel n’en fait cependant pas un facteur aggravant assorti d’une amende supplémentaire.
La résidence Paul-H.-Bilodeau, du nom du propriétaire qui l’a fait construire en 1966, n’était pas classée monument historique.
Elle était cependant inscrite au registre des bâtiments patrimoniaux de la ville de Québec.
Cette maison, dessinée par l’architecte André Robitaille, était représentative du «patrimoine moderne» et des tentatives de l’après-guerre pour renouveler l’architecture résidentielle.
La Ville estimait que sa «forme générale» devait être conservée, ainsi que les matériaux et les «composantes architecturales associées à ce courant».
Pourquoi un propriétaire qui a payé 1,2 M $ pour l’acquérir et avait obtenu un permis pour l’agrandir dans le respect de ces objectifs patrimoniaux a-t-il ensuite décidé de la démolir?
C’est la question que tout le monde se pose.
Il n’est pas rare que des promoteurs fassent fi des amendes et abattent des arbres sans permis en faisant le calcul que ça ne pèsera pas lourd sur les profits attendus.
Mais ce raisonnement tient difficilement la route ici.
La résidence du 2555, avenue du Cap-au-Diable, comme beaucoup d’autres dans les quartiers qui surplombent les falaises de Québec, était dérogatoire au zonage sur les fortes pentes et bénéficiait de droits acquis.
Une interprétation raisonnable voudrait qu’en démolissant cette maison, le propriétaire a mis fin à ces droits acquis.
Ce n’est pas comme si un incendie, une tornade ou une autre «cause hors du contrôle du propriétaire» l’avait détruite.
Dans un tel cas, le règlement donne 12 mois pour reconstruire et conserver le droit acquis.
Il y a là une logique, car autrement les bâtiments dérogatoires (ils sont nombreux à Québec) perdraient de leur valeur. Qui voudrait acheter une maison qu’il serait impossible de reconstruire en cas d’incendie?
La règle est différente pour une démolition volontaire. À moins que quelque chose m’ait échappé, toute reconstruction devra respecter le règlement d’urbanisme en vigueur.
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