Baptiste Ricard-Châtelain
Le Soleil
Nous vous avions présenté le projet de l’homme d’affaires Nicolas Paradis, dans le cadre de notre série sur les bâtiments négligés de la capitale. Il promettait de soigner quatre grosses verrues immobilières de la rue Saint-Paul, dans le Vieux-Port, en un seul traitement-choc. Finalement, il s’est résolu à en traiter seulement deux, pour l’instant… Et il demande à la ministre de la Culture, Nathalie Roy, de l’autoriser à s’attaquer aux deux autres.
Il y a beaucoup d’action sur Saint-Paul. Des ouvriers de la voirie retapent la petite rue. D’autres érigent de nouveaux bâtiments.
Déjà, au 141, des murs s’élèvent sur le trou créé fin 2017, à la suite de la disparition de la maison Tremain-Stuart. Négligée durant nombre d’années, la demeure bâtie en 1820 par l’entrepreneur maçon James Stuart, à la demande du promoteur immobilier Benjamin Tremain, avait été dévorée par les flammes.
Le rez-de-chaussée de la nouvelle structure sera occupé par un commerce, les trois étages du haut par trois logements. «Normalement, ce sera fini au début de l’année», note Nicolas Paradis.
Plus petit projet des quatre que cultive le constructeur sur la rue Saint-Paul, le 141 a un budget de 1,4 million $. La Ville versera une subvention de 230 000 $ parce qu’elle impose des «surcoûts reliés aux exigences patrimoniales comprennent notamment la tôle à baguette, les portes et fenêtres traditionnelles, les matériaux de finition extérieure, l’entrée en granite ainsi que les contraintes dans l’organisation du chantier», nous apprend un document officiel.
Resto et appartements touristiques
Un peu plus à l’ouest, au 196, un autre chantier s’ébranle. «On commence les travaux tranquillement pas vite.»
Pour l’instant, nous n’y voyons toujours que la façade de l’ancien édifice Dupuis de 1860. Un échafaudage de béton et de bois soutient toujours ce vestige qui devrait être intégré au futur immeuble.
L’étage du bas sera réservé pour un restaurant : Le Clandestin. Il sera accessible par les deux faces, rue Saint-Paul et rue Quai Saint-André. Il offrira un décor de l’époque de la prohibition, selon le prospectus promotionnel. Dessus seront aménagés 45 appartements touristiques dans un concept nommé Le Rive.
«L’ouverture est prévu pour fin 2022, début 2023.» Autant celle du resto que des logis offerts en location courte durée.
«Je suis en train de crier à l’aide pour le 209, 213 Saint-Paul. J’ai vraiment un problème. J’ai besoin d’un coup de main.»
Au cours de notre échange téléphonique, l’homme d’affaires Nicolas Paradis semblait particulièrement excédé. Ces deux dossiers sont bloqués au ministère de la Culture et des Communications qui a un droit de veto sur les constructions dans le site historique du Vieux-Québec. Sa vision n’a pas séduit les fonctionnaires.
«Je pense que c’est de l’entêtement», balance-t-il. «Je ne pense pas que la ministre sait ça. […] J’ai besoin que la ministre elle vienne.»
«Il faut que quelqu’un embarque sur la rue Saint-Paul pour régler les problèmes», enchaîne-t-il. «J’ai besoin d’un coup de main de la ministre.»
Intégrés
Le 209 fait le coin des rues Saint-Paul et Saint-Thomas. Ce bâtiment jaune de trois étages est protégé par l’État parce qu’il a un âge vénérable : 174 ans.
Nicolas Paradis a déjà investi pour le solidifier. Et se dit prêt à poursuivre la restauration. Mais il désire, en échange, qu’on lui permette de planter un bâtiment moderne sur le lot voisin, bâtiment qui aurait une section en porte-à-faux par-dessus la patrimoniale d’à côté. Il y aurait 6 étages abritant 21 logements et 2 commerces.
C’est ici que les visions du promoteur et du ministère s’entrechoquent.
«On a fait 6 versions», fait-il valoir. «Ils continuent à dire “non”. […] Le ministère est trop sévère.»
«Avec le 209 et le 213 Saint-Paul, je ne sais plus quoi faire. […] C’est un dossier qui est bloqué depuis des années.»
Une nouvelle rencontre entre les parties devrait avoir lieu avant la fin septembre.
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