Anne Guérette
Citoyenne engagée, architecte et ex-politicienne
Point de vue
Le Soleil
OPINION / Le pouvoir encore insoupçonné de l’aménagement du territoire sur le «vivre-ensemble».
Combien touchant de voir émerger tous les bons sentiments exprimés à la suite de l’atroce fusillade qui a tué six pères de famille de confession musulmane le 29 janvier 2017. Combien rassurant de voir émerger la solidarité et la mise en œuvre d’actions concrètes visant à soutenir, commémorer et indemniser la communauté musulmane de Québec qui vit un deuil immense et qui se mobilise pour faire naitre le positif de cette tragédie et nous guider vers un meilleur «vivre-ensemble». Mais concrètement, comment allons-nous collectivement poursuivre cette collaboration ouverte et constructive vers une communauté qui inspire en matière de «vivre-ensemble»?
Au-delà d’un cimetière ou d’une œuvre d’art, certes importants et hautement significatifs, quelle doit être la prochaine action à favoriser pour ce meilleur «vivre-ensemble» que nous réclamons? Quel est le prochain pas à initier par notre collectivité et par nos autorités politiques pour encadrer et soutenir les initiatives qui vont faire le poids pour un «vivre-ensemble» durable?
Mon point de vue
À mon point de vue, le prochain pas qui s’impose touche l’aménagement du territoire, ce pilier qui façonne notre environnement bâti, naturel ainsi que notre économie. Nous avons assez de ces «boites à humains» toujours plus haut, toujours plus gros qui semblent «fabriquées en série». Ce dont notre territoire a besoin pour plus de «vivre-ensemble», c’est la création de milieux de vie de qualité, à échelle humaine et accessibles pour les familles de toutes les classes sociales et de toutes les origines.
De nombreuses familles dans le monde se déplacent à la recherche de ce que nous, «Québécois de souche» tenons pour acquis, c’est-à-dire un environnement sécuritaire où on peut gagner dignement sa vie, avoir un toit pour abriter sa famille et être libre d’être soi. Parallèlement à cela, nous savons que le manque de main d’œuvre affecte de manière de plus en plus tangible notre développement, notre économie et notre compétitivité. Pour se positionner comme leader en matière de «vivre-ensemble» et mieux attirer, retenir, intégrer et développer le sentiment d’appartenance chez les nouveaux arrivants, il faut «rénover» les lois, les règlements et les façons de faire conventionnelles en matière d’aménagement du territoire. Les architectes, les urbanistes et les aménagistes le réclament d’ailleurs en vain depuis plusieurs campagnes électorales…
À la ville de Québec, plusieurs «morceaux de territoire» qui nous appartiennent collectivement sont disponibles pour exécuter ce prochain pas vers un meilleur «vivre-ensemble». L’îlot Saint-Louis-de-Gonzagues dans le Vieux-Québec qui appartient à notre gouvernement provincial et le grand terrain de la Défense nationale à Ste-Foy qui appartient à notre gouvernement fédéral représentent à mon point de vue, deux cibles de choix. J’interpelle aujourd’hui nos autorités politiques à se positionner au-dessus des intérêts particuliers et des conflits de territoire pour soutenir, sur ces deux terrains stratégiques, la réalisation de projets qui seront le reflet de notre volonté réelle de bâtir plus de «vivre ensemble», des milieux de vie accessibles où nos enfants pourront jouer dehors après l’école en toutes saisons et en toute sécurité, où les parents pourront aller au travail à proximité, en transport actifs ou publics et où les aménagements permettront aux aînés de vivre une vie saine et de participer à la vie de la communauté. Voilà ce que peut créer le pouvoir insoupçonné de l’aménagement du territoire, voilà comment nous pourrions prendre ensemble la route d’un «vivre-ensemble» toujours meilleur en soutenant la qualité de la vie et l’enrichissement durable de notre communauté!
Un peu de volonté politique et le tour sera joué!
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